Le but de cette présentation est de montrer comment on peut utiliser HAProxy et Varnish ensemble pour accélérer et fiabiliser des sites et applications web.
HAProxy va servir de 1er serveur web pour le client HTTP. Il va faire la terminaison TLS, décider si la requête doit être acceptée ou rejetée, transmettre à Varnish s'il est disponible et si on veut faire du cache, et enfin il va transmettre la requête au serveur (singulier) ou serveurs (pluriel) web finaux.
Il sert donc de proxy, avec des capacités de répartiteur de charge et de tolérance de panne.
Varnish va servir à mettre en cache le résultat de certaines requêtes pour ne pas avoir à solliciter le serveur applicatif final. Il va appliquer des règles plus ou moins complexes pour décider s'il met en cache,s'il sert depuis le cache…
Je connais mieux HAProxy que Varnish, donc pour cette fois je vais donner plus de détails sur HAProxy.
## Comment combiner HAProxy et Varnish
HAProxy fonctionne selon le principe de « frontend/backend ».
Un « frontend » est un point d'entrée HTTP (ou TCP) sur un ou plusieurs couples « IP:PORT ».
En mode HTTP il permet d'analyser tous les éléments de la requête pour prendre des décisions.
Il passe ensuite la requête à un « backend » qui définit la façon dont on parle à l'élément suivant dans la chaîne. Le plus souvent il s'agit d'un ou plusieurs serveurs d'application. On y gère les éventuelles règles de répartition de charge ou de bascule en cas d'incident, les mécanismes de surveillance de disponibilité…
Dans notre cas, pour l'exemple typique, c'est à Varnish que HAProxy va passer la requête.
Nous avons choisi de placer HAProxy et Varnish sur le même serveur, et de les faire communiquer par socket, mais c'est un détail et rien n'empêche de les mettre sur des serveurs différents.
Une fois la requête transmise à Varnish, il va également l'analyser pour décider s'il peut servir une réponse depuis le cache ou s'il doit la faire passer. Et s'il l'a fait passer, lors du retour il va décider s'il peut la mettre en cache.
Dans le cas le plus courant d'utilisation de Varnish, lorsqu'il dit faire passer une requête, il le fait directement au serveur d'application. Nous avons choisi de faire un peu différemment et de ne pas gérer dans Varnish la partie load-balancing et tolérance de panne, car elle est gérée de manière plus complète par HAProxy, et c'est ce que nous maitrisons le mieux.
Mais pour ne pas tomber dans une boucle, et pour ne pas refaire certaines analyses déjà faites au début, nous faisons entrer la requête par un autre « frontend ». Celui-ci sera plus simple et aura comme principale responsabilité de choisir le « backend » final à utiliser pour la requête. Si vous gérer des sites ou applications qui sont réparties sur des groupes de serveurs différents, il faut avoir autant de « backen » que de groupes de serveur.
La réponse fera le chemin inverse, en revenant à HAProxy, puis Varnish (qui décidera q'il met la réponse en cache), puis HAProxy puis le client HTTP qui a fait initialement la requête.
Dans HAProxy, au niveau du frontend il y a une ACL qui permet de savoir si Varnish est disponible ou pas. Nous pouvons donc transmettre à Varnish s'il est dispo ou le contourner s'il est absent :
Dans leur rôle de proxy intermédiaire, HAProxy et Varnish sont vus comme des clients au niveau TCP ; entre eux, mais surtout vis-à-vis du serveur web final. Si on ne fait rien de particulier,le serveur final verra toujours l'IP d'HAProxy comme IP du client. Ça rend impossible l'application d’autorisations ou restrictions par IP. Ça rend difficile le suivi des requêtes, les statistiques…
Vous me direz qu'on a pour ça l'en-tête HTTP `X-Forwarded-For`, mais elle est invisible ua niveau TCP, et sa prise en compte au niveau applicatif n'est pas toujours possible.
Le PROXY protocol est une simple extension de TCP qui permet d'ajouter cette notion d'IP réelle du client.
Cela impose que les 2 parties de l'échange sachent gérer cette extension, mais à partir de là il n'est plus besoin de le gérer dans la couche applicative.
### Comment?
Au niveau HAProxy, nous retrouvons celà dans le backend qui transmet à Varnish, dans le frontend de retour depuis Varnish et éventuellement dans le backend qui transmet au serveur web final.
```
backend varnish
option httpchk HEAD /varnishcheck
server varnish_sock /run/varnish.sock check observe layer7 maxconn 3000 inter 1s send-proxy-v2
frontend internal
bind /run/haproxy-frontend-default.sock user root mode 666 accept-proxy
backend example_com
server example-hostname 1.2.3.4:443 check observe layer4 ssl verify none send-proxy-v2
```
Lorsqu'HAproxy est client on ajoute `send-proxy-v2` et lorsqu'il est serveur on ajoute `accept-proxy`.
Pour Varnish, l'écoute se gère dans la ligne de commande de démarrage avec l'option `PROXY` :
```
/usr/sbin/varnishd […] -a /path/to/varnish.sock,PROXY […]
```
Et pour le retour vers HAProxy, c'est dans la configuration, avec l'option `proxy_header = 1` :
```
backend default {
.path = "/run/haproxy-frontend-default.sock";
.proxy_header = 1;
[…]
}
```
### Debug sans PROXY protocol
Bien que ça soit une optimisation très appréciable, elle n'est pas compatible avec de nombreux outils qui peuvent avoir besoin de se connecter à HAProxy ou Varnish de manière classique.
C'est particulièrement utile au niveau de Varnish pour faire du debug sans passer par HAProxy. On ajoute alors à la ligne de commande de démarrage un autre point d'entrée. Nous le faisons uniquement en local, sur un port inaccessible à l'extérieur :
```
/usr/sbin/varnishd […] -a 127.0.0.1:82 […]
```
Si la liaison finale entre HAProxy et le serveur final se fait aussi avec le PROXY protocol, alors on peut faire la même chose que dans Varnish et mettre une écoute protégée et sans PROXY protocol.
Bien que nous utilisions le PROXY protocol en interne (et éventuellement vers certains serveurs finaux), nous conservons le'en-tête HTTP `X-Forwarded-For`.
http-request set-header X-Forwarded-Proto http if !{ ssl_fc }
http-request set-header X-Forwarded-Proto https if { ssl_fc }
```
### X-Unique-ID
Il est très utile de marquer une requête entrante d'un identifiant unique qui pourra être transmis d'étape en étape jusqu'au serveur final (et pourquoi pas au retour aussi).
```
frontend external
[…]
http-request set-header X-Unique-ID %[uuid()] unless { hdr(X-Unique-ID) -m found }
```
Il n'y a pas de réel consensus sur le nommage de l'en-tête. On trouve souvent `X-Unique-ID` ou `X-Request-ID`.
Sur le frontend « external » nous marquons la requête comme étant passée en étape 1 par « haproxy-external ». Les autres étapes de la requête sauront alors que la requête est entrée par là.
Lorsque réponse resortira de ce backend pour aller au client, on la marque aussi pour indiquer que l'étape 1 était « haproxy-external » en précisant si la connexion était en http ou https.
:warning: Il vaut mieux ne pas activer cela en production, mais ça peut être très utile pour permettre à un client en mode test/préprod de vérifier comment se comporte le proxy.
Lorsque le site ou l'application web final dispose de plusieurs serveurs pour gérer les requêtes, on peut prendre en charge directement dans HAProxy la répartition de charge.
Lorsque c'est possible, on fait de préférence un `round-robin` sur les serveurs web.
Lorsque l'application gère mal les sessions ou des aspects bloquants, on met un serveur en actif et les autres en backup, pour basculer sur un secours si le primaire n'est plus disponible.
### Côté HAProxy
Pour éviter que HAProxy + Varnish ne soient un « Single Point Of Failure », nous avons mis en place 2 serveurs différents dans 2 réseaux différents et nous faisons un round-robin DNS en amont.
Cette approche n'est pas la plus avancée, car en cas de panne d'un serveur il faut intervenir au niveau DNS. Cependant elle a le mérite de la simplicité et les pannes complète de machines virtuelles tournant sur de la virtualisation redondante sont heureusement très rares. En revanche, ce système nous permet pas mal de souplesse.
Il serait aussi possible de faire du « actif-passif » en mettant une IP flottante (keepalived/vrrp) en amont de deux serveurs, pour avoir une bascule automatique sur le secondaire en cas de panne du primaire.
On peut aussi faire du « actif-actif » avec 2 HAProxy en « layer 4 » qui renvoient ensuite sur 2 HAproxy en « layer 7 »
Ces approches permettent une reprise d'activité quasi immédiate en cas de panne, mais elles impliquent plus de ressources et une topologie réseau particulière.
## Fonctionnalités complémentaires
### Filtrage TCP
Dans le frontend « external » qui gère le trafic entrant, nous pouvons vérifier si le client doit être immédiatement rejeté, par exemple selon son adresse IP :
```
frontend external
[…]
# Reject the request at the TCP level if source is in the denylist
tcp-request connection reject if { src -f /etc/haproxy/deny_ips }
```
Cela ne remplace pas un vrai firewall, mais ça permet de facilement exclure des client au niveau TCP (couche 4).
### Filtrage HTTP
En analysant la requête au niveau HTTP (couche 7), on peut filtrer de manière beaucoup plus fine.
Par exemple, si un site est passé en mode maintenance (détaillé plus loin), on peut contourner ce mode maintenance pour une liste d'IP particulière qui pourra tout de même consulter le site.
```
frontend external
[…]
# List of IP that will not go the maintenance backend
# If no server is defined, a 503 is returned for every request
```
Pour les outils locaux de monitoring (exemple: Munin) ou pour les challenges ACME, il peut être utile de renvoyer sur un serveur web local (exemple: Apache ou Nginx), au lieu de renvoyer sur Varnish ou les serveurs web appliatifs.
```
frontend external
[…]
# Is the request coming for the server itself (stats…)